Dimanche, 16-04-23

16. Dim – B - DEUXIEME DIMANCHE DE PAQUES - DIMANCHE DE LA DIVINE MISERICORDE - G, C, P pascale 1– Comm. Pr. –1ère Lecture : Ac Ac 2, 42-47 ; Ps118 (117), 2-4,16ab-18,22-24 ; 2ème Lecture : 1 P 1, 3-9 ;Evangile : Jn 20, 19-31. Méditation donnée par l’Abbé Marc NIZEYIMANA, Recteur du Grand Séminaire de Rutongo

PREMIERE LECTURE - Actes des Apôtres 2,42-47

42 Les frères étaient assidus à l’enseignement des Apôtres
et à la communion fraternelle,
à la fraction du pain
et aux prières.
43 La crainte de Dieu était dans tous les cœurs
à la vue des nombreux prodiges et signes
accomplis par les Apôtres.
44 Tous les croyants vivaient ensemble,
et ils avaient tout en commun ;
45 ils vendaient leurs biens et leurs possessions,
et ils en partageaient le produit entre tous
en fonction des besoins de chacun.
46 Chaque jour, d’un même cœur,
ils fréquentaient assidûment le Temple,
ils rompaient le pain dans les maisons,
ils prenaient leurs repas avec allégresse et simplicité de cœur ;
47 ils louaient Dieu
et avaient la faveur du peuple tout entier.
Chaque jour, le Seigneur leur adjoignait
ceux qui allaient être sauvés.

PSAUME - 117 (118)

Oui, que le dise Israël :
Éternel est son amour !
Que le dise la maison d’Aaron :
Éternel est son amour !
Qu’ils le disent, ceux qui craignent le SEIGNEUR :
Éternel est son amour !

On m’a poussé, bousculé pour m’abattre ;
mais le SEIGNEUR m’a défendu.
Ma force et mon chant, c’est le SEIGNEUR ;
il est pour moi le salut.
Clameurs de joie et de victoire
sous les tentes des justes.

La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre d’angle ;
c’est là l’œuvre du SEIGNEUR,
la merveille devant nos yeux.
Voici le jour que fit le SEIGNEUR,
qu’il soit pour nous jour de fête et de joie !

DEUXIEME LECTURE - première lettre de saint Pierre apôtre 1, 3-9

3 Béni soit Dieu, le Père
de notre Seigneur Jésus Christ :
dans sa grande miséricorde,
il nous a fait renaître pour une vivante espérance
grâce à la résurrection de Jésus Christ d’entre les morts,
4 pour un héritage qui ne connaîtra
ni corruption, ni souillure, ni flétrissure.
Cet héritage vous est réservé dans les cieux,
5 à vous que la puissance de Dieu garde par la foi,
pour un salut prêt à se révéler dans les derniers temps.
6 Aussi vous exultez de joie,
même s’il faut que vous soyez affligés,
pour un peu de temps encore, par toutes sortes d’épreuves ;
7 elles vérifieront la valeur de votre foi
qui a bien plus de prix que l’or
– cet or voué à disparaître
et pourtant vérifié par le feu –,
afin que votre foi reçoive louange, gloire et honneur
quand se révélera Jésus Christ.
8 Lui, vous l’aimez sans l’avoir vu ;
en lui, sans le voir encore, vous mettez votre foi,
vous exultez d’une joie inexprimable et remplie de gloire,
9 car vous allez obtenir le salut des âmes
qui est l’aboutissement de votre foi.

EVANGILE - selon saint Jean 20,19-31

C’était après la mort de Jésus.
19 Le soir venu, en ce premier jour de la semaine,
alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples
étaient verrouillées par crainte des Juifs,
Jésus vint, et il était là au milieu d’eux.
Il leur dit :
« La paix soit avec vous ! »
20 Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté.
Les disciples furent remplis de joie
en voyant le Seigneur.
21 Jésus leur dit de nouveau :
« La paix soit avec vous !
De même que le Père m’a envoyé,
moi aussi, je vous envoie. »
22 Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux
et il leur dit :
« Recevez l’Esprit Saint.
23 À qui vous remettrez ses péchés,
ils seront remis ;
à qui vous maintiendrez ses péchés,
ils seront maintenus. »
24 Or, l’un des Douze, Thomas,
appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau),
n’était pas avec eux quand Jésus était venu.
25 Les autres disciples lui disaient :
« Nous avons vu le Seigneur ! »
Mais il leur déclara :
« Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous,
si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous,
si je ne mets pas la main dans son côté,
non, je ne croirai pas ! »
26 Huit jours plus tard,
les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison,
et Thomas était avec eux.
Jésus vient,
alors que les portes étaient verrouillées,
et il était là au milieu d’eux.
Il dit :
« La paix soit avec vous ! »
27 Puis il dit à Thomas :
« Avance ton doigt ici, et vois mes mains ;
avance ta main, et mets-la dans mon côté :
cesse d’être incrédule,
sois croyant. »
28 Alors Thomas lui dit :
« Mon Seigneur et mon Dieu ! »
29 Jésus lui dit :
« Parce que tu m’as vu, tu crois.
Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
30 Il y a encore beaucoup d’autres signes
que Jésus a faits en présence des disciples
et qui ne sont pas écrits dans ce livre.
31 Mais ceux-là ont été écrits
pour que vous croyiez
que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu,
et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

MEDITATION

L’Evangile de ce deuxième dimanche de Pâques, dit « Dimanche de la Divine Miséricorde », est bien connu. Souvent, ce récit pousse pas mal de personnes à porter un jugement négatif à Thomas. Comme Thomas est mal compris, nous allons tenter de le réhabiliter. C’est quelqu’un qui était concret dans ce qu’il disait. Au cours du dernier repas, quand Jésus a dit : « Du lieu où je vais, vous savez le chemin », Thomas a directement objecté : « Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment saurions-nous le chemin ? » (Jn 14,4-5) De Thomas nous connaissons aussi sa disponibilité à tout donner à son Maître, jusque même à mourir pour lui. Un jour, quand Jésus, ayant appris la maladie de Lazare, se décida de se rendre en Judée, bien qu’il y risquait d’être lapidé, c’est bien Thomas qui a encouragé les autres disciples : « Allons, nous aussi, pour mourir avec lui ! » (Jn 11,16)
Dans le récit de ce dimanche, on dit que Thomas était absent lors de la première apparition de Jésus aux disciples. Personne ne se demande le pourquoi de cette absence, probablement injustifiée, mais on se contente de condamner son incrédulité. Bien sûr, nous ne pouvons pas nier que Jésus aussi a condamné son manque de foi : « Ne devient pas incrédule, mais croyant. » Toutefois, les paroles de Jésus manifestent un reproche amical, fraternel, venant d’une sympathie et d’une tendresse humaine. Jésus ne nous demande pas de suffoquer nos doutes ou nos incompréhensions, surtout dans le domaine de la foi. Il ne nous dit pas : « tais-toi, ne soulève pas d’objection quand il t’est demandé de croire. » La preuve en est qu’il a accepté de montrer ses mains et son côté à Thomas. Quel genre de foi serait celle qui ne se pose pas de questions et qui accepte tous sans même comprendre ? La foi qui ne se pose pas de questions serait superficielle et passive. La vraie foi est toujours une tension entre le besoin de voir et l’impossibilité d’obtenir les preuves tangibles.
Comment peut-on condamner Thomas alors que les autres disciples, lors de la première apparition, ont aussi cru après avoir vu ? : « Ayant dit cela, il leur montrant ses mains et son côté. » De l’Apôtre Jean on dit que quand il est entré dans le tombeau vide, « il vit et il crut » (Jn 20,8). C’est ce même Jean qui, au débit de sa première épître, écrit : « Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux … ce que nos mains ont touché … nous vous l’annonçons, afin que vous aussi soyez en communion avec nous » (1 Jn 1,1-3). Pauvre Thomas, s’il a voulu voir et toucher, il ne s’est pas comporté différemment de Marie Magdeleine qui voulait toucher Jésus ressuscité (Jn 20,17) !
On peut dire que le doute de Thomas a été d’un grand avantage pour lui. Le récit ne nous dit pas qu’il a d’abord touché les plaies de Jésus, mais il a fait une belle profession de foi : « Mon Seigneur et mon Dieu. » Il a reconnu Jésus, non seulement comme Seigneur, mais aussi comme Dieu. Dans l’Evangile selon Saint Jean, Jésus est appelé Dieu seulement deux fois : dans le Prologue et ici de la bouche de Thomas.
Prenons aussi en considération les preuves que Thomas a exigées : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets pas ma main dans son côté, je ne croirai pas. » Thomas n’a pas besoin de toucher le corps glorieux de Jésus, comme Marie Magdeleine (Jn 20,17), il veut toucher les plaies de sa passion ; il veut prendre part à sa passion, il veut se plonger dans le mystère de sa mort, de son amour. La voie pour pouvoir croire, Thomas ne la chercher pas dans des signes de puissance humaine mais dans l’image de l’amour. On pourrait dire qu’il est amoureux des plaies du Christ comme l’ont été des grands mystiques dont François d’Assise et Catherine de Siène.
Aujourd’hui, il y a tendance, parmi les chrétiens, à privilégier le discours sur la résurrection tout en ignorant la croix. La croix serait une image trop opprimante. Pourtant, Jésus est apparu comme celui qui était mort sur la croix et il portait encore les signes des clous. Il n’avait pas d’autres signes révélateurs que celui de montrer ses plaies. Pour connaitre le vrai Dieu et communiquer avec la plénitude de la vie divine, il faut être strictement uni au Christ dans sa mort et dans ses souffrances, endurées par amour. La résurrection n’est pas une négation de la croix, mais son couronnement. La raison de la mort sur la croix est l’amour, toujours prêt à se donner, et la résurrection est l’amour qui est plus fort que la mort. Pour ce, il est juste que les plaies restent à jamais marquées sur le corps glorieux de Jésus. Surtout, de son côté ouvert, source de la divine miséricorde comme elle a été révélée à Faustina Kowalska, ne sort plus du sang, mais de la lumière. De cette lumière nous comprenons que nous ne vivons plus dans l’humiliation mais dans la liberté.
De Thomas nous avons eu l’opportunité de recevoir de Jésus une autre béatitude, la neuvième après les huit du Sermon sur la Montagne (Mt 5,1-11) : « Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru. » C’est la même béatitude qui a été annoncée à la Vierge Marie par Elisabeth : « Heureuse celle qui a cru » (Lc 1,45). La foi est la béatitude la plus belle. Cette béatitude pourrait être pour nous la plus possible, la plus consolante. Il est difficile d’avoir une âme pauvre, d’être doux, d’être miséricordieux, d’être pur de cœur, … mais quant à « croire sans avoir vu », ceci est à portée de tout le monde. Ceci ne veut pas dire que nous devrions renoncer au désir de voir. Ne nous contentons pas donc des belles paroles, cherchons au contraire quelque chose de concret qui puisse nous parler de la présence du Christ. Pour adhérer au Christ, nous avons besoin des signes concrets qu’il nous a laissés : sa paix, son pardon, la communauté des fidèles qui incarnent son Evangile.
Il y a un autre signe qui permet de reconnaitre Jésus ressuscité, la joie : « Les disciples furent remplis de joie à la vue du Seigneur. » Ici, on sous-entend une autre plaie qui ne se trouvait pas sur le corps de Jésus, mais dans le cœur des disciples : la peur. Cette peur est vaincue par la paix, la joie d’être aimé et de porter l’amour.
Le Seigneur est apparu aux disciples après le sabbat, le premier jour de la semaine, le dimanche. Il est retourné le huitième jour, encore une fois le dimanche. Ceci constitue une raison suffisante de comprendre qu’avec sa résurrection, le sabbat juif a été remplacé par le dimanche comme « Jour du Seigneur » (Ap 1,10). C’est le jour où le Seigneur se fait connaitre dans le signe de son amour miséricordieux, pour qu’il nous soit aussi possible de le reconnaitre dans d’autres jours à travers nos frères et sœurs les plus faibles. Malheureusement, notre dimanche est devenu tout simplement comme la fin de la semaine, le jour des loisirs, et non le jour du Seigneur. Certains chrétiens se demandent s’il existe encore l’obligation de participer dans la messe dominicale. Cette demande serait comme si on se demandait si chaque dimanche on est obligé de recevoir la paix et la joie du Christ ressuscité, ou si les amoureux sont obligés de se rencontrer chaque dimanche.
Abbé Marc NIZEYIMANA, Recteur du Grand Séminaire de Rutongo