Conférence CEJP- L’éducation recommandée comme meilleure arme dans la lutte contre les VBG

La Commission épiscopale Justice et Paix (CEPJ) de l’Église catholique au Rwanda et ses partenaires, les représentants des institutions gouvernementales en charge de la famille, de l’éducation, de l’égalité des sexes et de la protection sociale, ainsi que des organisations non gouvernementales, ont démontré qu’une bonne éducation des jeunes aiderait pour éradiquer la violence basée sur le genre (VBG) mieux que les lois, les politiques et les recherches incessantes.

Les participants à la conférence échangent sur les approches holistiques contre les VBG

Cela fait suite à la publication, dans une conférence organisée par la CEJP le 10 novembre 2022 au Centre missionnaire Lavigerie à Kigali, d’une recherche menée par la CEJP sur les obstacles à l’assistance aux victimes de VBG.
L’étude menée dans le cadre du renforcement de la marche vers l’égalité femmes-hommes, qui est un levier de développement durable a révélé que bien que des lois et des politiques existent pour prévenir la VBG et l’éradiquer de la société rwandaise, elle continue de faire rage dans le pays.
Pour cela, les participants à cette conférence ont suggéré que l’accent soit mis sur l’éducation. Ils constatent que sans éducation ni formation adéquates, les mesures juridiques, politiques et autres pour lutter contre la VBG peuvent ne pas être efficaces.
Son Eminence le Cardinal Antoine Kambanda, Président de la CEPJ qui a ouvert la conférence, a, lui aussi, souligné que l’éducation dans la famille, appuyée par celle de l’école, serait une arme efficace dans la lutte contre les VBG. Cependant, "pour l’éducation que nous voulons atteindre, il est nécessaire d’avoir un service d’écoute dans les écoles à l’endroit des parents et les enfants", a-t-il dit. Il a expliqué que ce service est approprié car les enfants peuvent avoir des problèmes au cours de leur éducation, peut-être à cause de la violence en famille, à l’école ou ailleurs, mais cela disparaît lorsqu’ils en parlent. Il en est de même pour les parents.
Il a également proposé un dialogue familial pour une bonne éducation. “De plus, dans le monde technologiquement avancé d’aujourd’hui, il est approprié que les éducateurs et les parents surveillent ce que font leurs enfants avec les réseaux sociaux, car ils peuvent également y acquérir de habitudes nuisibles à l’éducation et entrainant la VBG”, a recommandé le Cardinal Kambanda.
Son Excellence Monseigneur Vincent Harolimana, Evêque de Ruhengeri propose une pastorale pré et post nuptiale, c’est-à-dire une préparation prolongée au mariage et un accompagnement des familles pour ouvrir la voie à une meilleure éducation. “Un enfant grandi sans famille ou dans une famille conflictuelle, et par conséquent non soutenu, se cherche des moyens de se défendre, ce qui affectera son éducation et sa vie", a averti Mgr Harolimana.
L’Abbé Dr Vedaste Kayisabe, Recteur du Grand Séminaire Philosophicum de Kabgayi évoque la pertinence et l’efficacité de l’éducation comme fondement d’une famille/société exempte de violence et de conflits. Et pour que cette éducation réussisse, il a proposé qu’il y ait un vade-mecum sur la discipline, les bonnes manières dans la famille et à l’école.
Et dans le même but, certains participants à la conférence ont souhaité qu’il y ait des lois protectrices. « Dans cette éducation, nous devons neutraliser ceux qui confondent les enfants, comme ceux qui leur apprennent à porter des préservatifs au lieu de leur apprendre à se comporter et à vivre dans la droiture. Et c’est là où cette violence prend racine, dans cette mauvaise éducation », a prévenu l’abbé Jean Ndagijimana chargé de la commission diocésaine justice et paix et de la Caritas dans le diocèse de Gikongoro.
Selon Mgr. Alphonse Rutaganda, dans cette éducation, il faut mettre l’accent sur celle de la fille car la femme est le cœur de la famille et d’une société heureuse. "A heureuse famille, une meilleure femme", dit-il pour souligner l’importance de la femme dans une société.
Dans cette conférence, le Révérend Pasteur Annonciata Kabega, de l’Église Anglicane au Rwanda, a interpellé les pasteurs dits « entrepreneurs dans la fondation des familles ». « Ces pasteurs administrent le mariage des jeunes filles et des jeunes hommes » uniquement pour gagner leur argent. Et cela finit souvent par conduire à des conflits et à la violence familiale qui entravent la meilleure éducation des enfants de la famille », a-t-elle déclaré.
Quant à Madame Marie Immaculée Ingabire, Présidente de Transperancy International Rwanda (TI Rwanda), elle reconnaît également que les lois préviennent, cependant elles ne peuvent à elles seules mettre fin aux VBG. Sur ce, elle appelle à la rigueur dans l’éducation responsable, tâche qui incombe en premier lieu aux parents.
« Si un garçon de 19 ans viole une fille de 16 ans et que l’auteur est condamné à 20 ans de prison, sa vie est totalement gâchée. Si c’était moi, je condamnerais plutôt les parents de ce garçon qui ne lui ont pas donné l’éducation dont il avait besoin", dit-elle pour montrer à quel point les parents doivent surveiller de près l’éducation de leurs enfants.
La recherche publiée par la CEPJ a révélé que le signalement des cas de VBG est encore trop faible au Rwanda. Sur 397 répondants, 208 (soit 52, 39%) ne sont pas disposés à dénoncer leurs agresseurs quel que soit le soutien disponible et promis. Dans les milieux professionnels, 9 seulement sur 28 survivants des violences (soit 32.1%) ont aussi réussi à le signaler. Seulement 10% de l’ensemble des victimes d’abus sexuels ont déclaré l’avoir signalé à une institution/structure d’assistance contre 38% victimes de diverses autres formes de VBG qui n’ont fait recours à personne.
Par sa deuxième recommandation, cette recherche demande de reconsidérer la place de l’éducation dans la construction de sociétés sécurisées pour tous où l’égalité des genres, la complémentarité, la solidarité, le sens des responsabilités, la solidarité, l’intégrité et la compassion sont une culture.
DOCICO/CEPR