Dimanche, 31-10-21

31. Dim – Vr – TRENTE ET UNIEME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE - G, C, Préf. dominicale – 1è lecture : Dt 6, 2-6 ; Ps 18 (17), 2-3, 4, 47.51ab ; 2è lecture : He 7, 23-28 ; Évangile : Mc 12, 28b-34. Méditations données par l’Abbé Longin Nduwayezu, prêtre du Diocèse de Cyangugu et le Père Bernard Dourwe, Rcj.

PREMIERE LECTURE – livre du Deutéronome 6, 2 – 6
Moïse disait au peuple :
2 « Tu craindras le SEIGNEUR ton Dieu.
Tous les jours de ta vie,
toi, ainsi que ton fils et le fils de ton fils,
tu observeras tous ses décrets et ses commandements,
que je te prescris aujourd’hui,
et tu auras longue vie.
3 Israël, tu écouteras,
tu veilleras à mettre en pratique
ce qui t’apportera bonheur et fécondité,
dans un pays ruisselant de lait et de miel,
comme te l’a dit le SEIGNEUR, le Dieu de tes pères.
4 Ecoute, Israël :
le SEIGNEUR notre Dieu est l’Unique.
5 Tu aimeras le SEIGNEUR ton Dieu de tout ton coeur,
de toute ton âme et de toute ta force.
6 Ces paroles que je te donne aujourd’hui
resteront dans ton coeur. »

PSAUME – 17 (18), 2-3, 4, 47.51ab
2 Je t’aime, SEIGNEUR, ma force :
3 SEIGNEUR, mon roc, ma forteresse,
Dieu mon libérateur, le rocher qui m’abrite,
mon bouclier, mon fort, mon arme de victoire !
4 Louange à Dieu !
Quand je fais appel au SEIGNEUR,
je suis sauvé de tous mes ennemis.
47 Vive le SEIGNEUR ! Béni soit mon Rocher !
Qu’il triomphe, le Dieu de ma victoire !
51 Il donne à son roi de grandes victoires,
il se montre fidèle à son messie.

DEUXIEME LECTURE – lettre aux Hébreux 7, 23 – 28
Frères, dans l’ancienne Alliance,
23 un grand nombre de prêtres se sont succédés
parce que la mort les empêchait de rester en fonction.
24 Jésus, lui, parce qu’il demeure pour l’éternité,
possède un sacerdoce qui ne passe pas.
25 C’est pourquoi il est capable de sauver d’une manière définitive
ceux qui par lui s’avancent vers Dieu,
car il est toujours vivant
pour intercéder en leur faveur.
26 C’est bien le grand prêtre qu’il nous fallait :
saint, innocent, immaculé ;
séparé maintenant des pécheurs,
il est désormais plus haut que les cieux.
27 Il n’a pas besoin, comme les autres grands prêtres,
d’offrir chaque jour des sacrifices,
d’abord pour ses péchés personnels,
puis pour ceux du peuple ;
cela, il l’a fait une fois pour toutes
en s’offrant lui-même.
28 La loi de Moïse établit comme grands prêtres
des hommes remplis de faiblesse ;
mais la parole du serment divin, qui vient après la Loi,
établit comme grand prêtre le Fils
conduit pour l’éternité à sa perfection.

EVANGILE – selon Saint Marc 12, 28b-34
En ce temps-là,
28 un scribe s’avança vers Jésus pour lui demander :
« Quel est le premier de tous les commandements ? »
29 Jésus lui fit cette réponse :
« Voici le premier :
Ecoute, Israël :
le SEIGNEUR notre Dieu
est l’unique SEIGNEUR.
30 Tu aimeras le SEIGNEUR ton Dieu
de tout ton coeur, de toute ton âme,
de tout ton esprit et de toute ta force.
31 Et voici le second :
Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là. »
32 Le scribe reprit :
« Fort bien, Maître, tu as dit vrai :
Dieu est l’Unique
et il n’y en a pas d’autre que lui.
33 L’aimer de tout son coeur,
de toute son intelligence, de toute sa force,
et aimer son prochain comme soi-même,
vaut mieux que toute offrande d’holocaustes et de sacrifices. »
34 Jésus, voyant qu’il avait fait une remarque judicieuse, lui dit :
« Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu. »
Et personne n’osait plus l’interroger.

MEDITATION

"De quel amour j’aime ta loi : tout le jour je la médite ! Je surpasse en sagesse tous mes maîtres, car je médite tes exigences. Tes préceptes m’ont donné l’intelligence : je hais tout chemin de mensonge." (Ps 118)

Frères et Sœurs dans le Christ, les paroles "commandements", "ordres", "préceptes", "prescriptions", "loi", "exigences", "décisions" traversent tous les textes liturgiques de ce 31ème Dimanche du temps ordinaire. Ce sont des termes qui reviennent assez souvent dans notre vie quotidienne : les parents donnent des ordres aux enfants, les enseignants commandent un certain comportement aux élèves, nous sommes tous soumis aux lois qui régissent la société,... Bref, nous baignons tous dans cette ambiance où la vie est réglée par un code de conduite destiné à soutenir notre vivre ensemble solidaire et pacifique, ou par une force punitive dirigée contre qui d’entre nous se trouve défaillant. Mais comment comprendre cela dans un contexte liturgique ? Comment la Parole de Dieu nous place-t-elle devant ces mots qui peuvent engendrer en nous un sentiment de peur et de suspicion ? Pourquoi Dieu, auteur de la liberté, imposerait-il sur nous des lois, des commandements, des préceptes, des ordres ?

La première lecture nous montre que la loi de Dieu transmise à son peuple par Moïse est une promesse de vie, de bonheur et de fécondité : "Tous les jours de ta vie [...] tu observeras tous ses commandements et ses ordres, que je te prescris aujourd’hui, et tu auras longue [...] Tu veilleras à mettre en pratique ce qui t’apportera bonheur et fécondité". Les commandements de Dieu, ce sont des paroles de vie par lesquelles Dieu scelle l’alliance avec son peuple Israël : une alliance fondée sur l’amour de Dieu pour son peuple et sur l’amour fidèle de celui-ci à l’egard de Dieu. Ce dernier naît d’un acte de foi au Dieu unique, qui s’est fait proche de nous pour nous introduire dans la vraie liberté et dans le bonheur véritable : "Le Seigneur notre Dieu est l’Unique". Il s’agit d’une confession de foi introduite par un appel à être attentif à cette vérité de foi. En effet, elle est introduite par cette parole "Shema Israel" (Écoute, Israel) qui fait encore aujourd’hui le cœur de la prière juive et traduit l’adhésion libre et joyeuse de l’homme, l’obéissance filiale, à la proposition d’amour faite par Dieu : l’homme est appelé à répondre par un amour libre et une foi toujours renouvelée.
C’est ce à quoi nous invite Jésus tel que nous l’entendons dans le passage de l’Évangile de Marc qui nous est proposé. Jésus répond à la question d’un scribe qui est curieux de savoir s’il y a une hiérarchie entre les commandements de Dieu : "Quel est le premier de tous les commandements ?" Les commandements de Dieu, nous le savons, sont les Dix Paroles (Decalogue) que Moïse a transmises au peuple sur le Sinaï et telles qu’il les a condensées dans les deux brèves formules que reprend Jesus : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force" (Dt 6, 5) et "Tu aimeras ton prochain comme toi-même" (Lev 19, 18).
Si le scribe pose cette question, c’est parce que la tradition judaïque avait fini par confondre ces commandements à une amalgame de traditions et de pratiques cultuelles tellement qu’il devenait de plus en plus difficile de les observer. Alors Jésus indique la voie de revenir à l’essentiel : le premier commandement consiste à honorer Dieu, ce qui est impossible en dehors d’un amour affectif du prochain, mesure definitive de notre relation à Dieu. Ce que Dieu attend donc de nous c’est un amour sans partage pour Lui et un amour désintéressé pour notre prochain.
Aimer Dieu, c’est d’abord reconnaître qu’il est l’unique Seigneur, de qui nous tirons "la vie, le mouvement et l’être" (Ac 17, 28), pour s’attacher à Lui de toutes nos forces, avec un coeur sans partage. Aimer Dieu, c’est mediter sa parole et la mettre en pratique. C’est aussi décider de fuire le mensonge et de vivre selon la vérité : "Je hais tout chemin de mensonge", nous inspire le psalmiste.

Comme nous le dit Saint Jean, la preuve que nous aimons Dieu, c’est la capacité d’aimer le prochain. Et Jésus indique que la mesure pour aimer l’autre est l’amour que nous avons pour nous-mêmes : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même". Il ne s’agit pas d’un amour égoïste ou égocentrique qui consiste à se replier sur soi-même et sur ses intérêts individuels, mais un amour propre de soi, qui consiste à vouloir le bien pour soi-même et à eviter ce qui lui fait mal. C’est ainsi que celui qui aime l’autre recherche ce qui contribue à son bien et éviter tout mal contre le prochain : "Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : c’est la Loi et les Prophètes" (Mt 7, 12).

La réponse de Jésus a éclairé le scribe qui fait preuve d’en comprendre la profondeur. Ce sur quoi Jésus le félicite et lui déclare : "Tu n’es pas loin du royaume de Dieu". Oui, rencontrer Jésus, c’est s’approcher du Royaume de Dieu : "Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi" (Jn 14, 6), nous rassure-t-il. Qui l’a rencontré dans sa Parole et dans l’Eucharistie peut confesser avec le psalmiste : tu es "la lumière de mes pas, la lampe de ma route". C’est lui le grand prêtre éternel, établi par Dieu pour nous introduire dans ce royaume, non selon la loi de Moïse, mais en vertu sa filiation divine et de son sacrifice qui nous sauve (cf. 2eme lecture). Demandons-lui de nous inspirer l’amour véritable de Dieu et de nos frères et sœurs, qu’il nous a indiqué comme l’unique voie vers Dieu. A Lui gloire, honneur et louange pour les siècles des siècles.
Amen.
Abbé Longin NDUWAYEZU, prêtre du Diocèse de Cyangugu.
=======================================

Homélie donnée par le Père Bernard Dourwe, Rcj.
Le christianisme est religion du bonheur mais aussi la religion de l’amour. Et le Seigneur nous rappelle fortement ce message fondamental aujourd’hui : nous devons aimer, aimer de tout notre cœur. Nous avons peut-être du mal à admettre que l’amour soit un « commandement » (1ère lecture), mais s’il nous est demandé d’aimer, c’est parce que le Seigneur nous aime le premier. Il nous l’a montré en Jésus, Grand Prêtre parfait (2ème lecture), qui nous donne un commandement nouveau : oui, il nous faut aimer Dieu notre Père, mais également aimer notre prochain, car nous sommes tous frères (Evangile).

Ce texte splendide de la première lecture extrait du Deutéronome est une exhortation pressante, adressée au peuple hébreu, pour qu’il mette en pratique le précepte fondamental de sa religion : l’amour de Yahvé, le Dieu unique.

Dans la deuxième lecture, l’Epître aux Hébreux exalte le sacerdoce du Christ : hymne d’admiration au Christ-Prêtre. Il est unique, il est parfait, il est éternel. Seul, il offre à Dieu le sacrifice digne de lui.

En réponse à un scribe qui lui demande ce qu’il y a de plus essentiel dans la religion, Jésus dans l’évangile de ce jour, répond que c’est l’amour, la loi d’amour, qui nous presse d’aimer Dieu de tout notre cœur et notre prochain comme nous-mêmes !
Aimer, un mot bien galvaudé de nos jours, et qui est pourtant le cœur de l’Evangile ! L’Ecriture en parle, en ce dimanche, comme d’un « commandement », mais Jésus nous aide à comprendre qu’il ne s’agit pas d’un ordre, bien sûr… L’enjeu n’est autre que notre vie, l’engagement de toute notre vie à la suite de la sienne qui n’a été qu’amour. C’est pourquoi, habités par son Esprit depuis notre baptême, nous devons aimer Dieu notre Père d’un amour filial, et du fait même aimer notre prochain d’un amour fraternel. Cet amour, en quelque sorte, doit qualifier le chrétien : c’est ce que signifie aimer « de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute sa force ». Plus que de faire, cela concerne notre manière d’être.
Nous ne pouvons pas nous contenter de nous poser la question : pour mieux vivre en chrétien ? L’interrogation doit être plus profonde, et nous savons bien qu’aimer nous engage totalement : sans doute faut-il changer notre regard, corriger nos jugements, considérer les personnes avec la tendresse même du Christ, et sans cesse nous ressourcer par la prière à l’amour du Christ. C’est ce qui, progressivement, imprégnera nos paroles et nos actes, jusqu’à faire de nous des témoins de son amour.

Reste à concrétiser cette injonction de Jésus dans nos vies ! Comment aimer ce Dieu que nous ne voyons pas ? Dt 6 nous invite d’abord à le choisir en le reconnaissant comme « l’Unique Seigneur », c’est-à-dire à le préférer à ces idoles que sont le « moi », l’argent, le plaisir, etc. Mais aimer Dieu, c’est aussi apprendre à l’aimer pour lui-même et non pour ses seuls dons. Et cela dans la durée, au creux des épreuves : deuils, revers de la vie, etc. Or, il s’agit là d’un vrai combat pour ne pas le maudire ou le renier, comme en témoignent les Psaumes. Mais c’est bien ainsi que nous nous préparons peu à peu, au don total de nous-même par amour : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi », nous dit Paul. Tel est le témoignage suprême ou martyre, qui peut être sanglant ou non sanglant.

“CES DEUX PRÉCEPTES » – que Jésus nous donne en citant Dt 6 et Lv 19 – « ne doivent jamais s’effacer de votre cœur : Dieu et le prochain… tel doit être l’objet de vos pensées, de votre méditation, de votre souvenir, de vos actions et de tous vos efforts » (saint Augustin). Et cela chaque jour, même brièvement et imparfaitement. Car ces deux commandements, qui résument toute la Loi (Rm 13), constituent le cœur même de la vie chrétienne comme de la vie juive. Arrêtons-nous sur l’amour de Dieu, qui engage tout notre être. Un amour intelligent et agissant, dont la source est en Lui qui est Amour. Certes, nous avons été créés à Son image, mais nos capacités d’aimer sont blessées. D’où ce « commandement » qui nous remet sur la voie de notre identité profonde et nous incite à implorer le secours de l’Esprit. Mais si nous pouvons aller jusque-là, n’est-ce pas parce que Dieu nous a aimés le premier ? Alors contemplons le Christ, homme et Dieu, qui, par amour, « s’est livré pour nous ».

Dieu notre Père, le premier commandement que tu as donné à ton peuple Israël le tournait tout entier vers toi, son Seigneur et son créateur. Donne-nous de savoir toujours reconnaître en toi l’unique Seigneur qui nous aime et nous conduit. Que ta Parole nous fasse mieux comprendre encore le désir que tu as de nous voir répondre à ton amour, par Jésus, ton Enfant, dans l’Esprit qui nous rassemble, maintenant et pour les siècles des siècles.
Père Bernard Dourwe, Rcj.