Dimanche, 06-10-19

6.Dim -VINGT SEPTIEME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE C
LECTURES : Habacuc : 1,2-2,4 ; Psaume 94 ; 2 Timothée : 1, 6-14 ; Luc : 17, 5-10
Homélie donnée par Père Bernard Dourwe, Rcj.

PREMIERE LECTURE – livre du prophète Habacuc 1, 2-3 ; 2, 2-4

1,2 Combien de temps, SEIGNEUR, vais-je appeler,
sans que tu entendes ?
crier vers toi : « Violence ! »,
sans que tu sauves ?
1,3 Pourquoi me fais-tu voir le mal
et regarder la misère ?
Devant moi, pillage et violence ;
dispute et discorde se déchaînent.
2,2 Alors le SEIGNEUR me répondit :
Tu vas mettre par écrit une vision,
clairement, sur des tablettes,
pour qu’on puisse la lire couramment.
2,3 Car c’est encore une vision pour le temps fixé ;
elle tendra vers son accomplissement, et ne décevra pas.
Si elle paraît tarder, attends-la :
elle viendra certainement, sans retard.
2,4 Celui qui est insolent n’a pas l’âme droite,
mais le juste vivra par sa fidélité.

PSAUME – 94 (95), 1-2, 6-7ab, 7d-8a.9

1 Venez, crions de joie pour le SEIGNEUR,
acclamons notre Rocher, notre salut !
2 Allons jusqu’à lui en rendant grâce,
par nos hymnes de fête acclamons-le !
6 Entrez, inclinez-vous, prosternez-vous,
adorons le SEIGNEUR qui nous a faits.
7 Oui, il est notre Dieu :
nous sommes le peuple qu’il conduit.
Aujourd’hui écouterez-vous sa parole ?
8 « Ne fermez pas votre coeur comme au désert
9 où vos pères m’ont tenté et provoqué,
et pourtant ils avaient vu mon exploit. »

DEUXIEME LECTURE – deuxième lettre de Saint Paul à Timothée 1, 6-8. 13-14
Bien-aimé,
6 je te le rappelle, ravive le don gratuit de Dieu
ce don qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains
7 Car ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné,
mais un esprit de force, d’amour et de pondération.
8 N’aie donc pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur,
et n’aie pas honte de moi, qui suis son prisonnier ;
mais, avec la force de Dieu, prends ta part des souffrances
liées à l’annonce de l’Évangile.
13 Tiens-toi au modèle donné par les paroles solides
que tu m’as entendu prononcer
dans la foi et dans l’amour qui est dans le Christ Jésus.
14 Garde le dépôt de la foi dans toute sa beauté,
avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous.

EVANGILE – selon Saint Luc 17, 5-10

5 En ce temps-là,
les Apôtres dirent au Seigneur :
« Augmente en nous la foi ! »
6 Le Seigneur répondit :
« Si vous aviez de la foi,
gros comme une graine de moutarde,
vous auriez dit à l’arbre que voici :
‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’,
et il vous aurait obéi.
7 Lequel d’entre vous,
quand son serviteur aura labouré ou gardé les bêtes,
lui dira à son retour des champs :
‘Viens vite prendre place à table’ ?
8 Ne lui dira-t-il pas plutôt :
‘Prépare-moi à dîner,
mets-toi en tenue pour me servir,
le temps que je mange et boive.
Ensuite tu mangeras et boiras à ton tour’ ?
9 Va-t-il être reconnaissant envers ce serviteur
d’avoir exécuté ses ordres ?
10 De même vous aussi,
quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné,
dites :
‘Nous sommes de simples serviteurs :
nous n’avons fait que notre devoir’ »

MEDITATION
L’Evangile de ce jour nous interpelle fortement au sujet de la vitalité de la foi de nos baptêmes… Mais l’ensemble des extraits de l’Ecriture qui nous sont proposés en ce dimanche disent aussi que la foi ne va pas sans l’amour, ce don reçu du Seigneur « qui nous a faits » (2ème lecture, psaume) et le service de nos frères (évangile). Dès lors, si nous vivons ainsi, dans la foi et l’amour, nous sommes « ajustés » au désir de Dieu, nous sommes « justes ». Et, comme dit le prophète, « le juste vivra par sa fidélité » (1ère lecture).

Dans la première lecture, nous voyons le prophète face à la violence des méchants et des puissants. Et nous aussi, nous sommes souvent démoralisés par toute cette montée de la violence, ces voitures piégées, ces bombes terroristes, ces agressions dans les rues, les collèges... Nous comprenons la plainte du prophète Habacuc, quand il crie, face au silence apparent de Dieu : "Combien de temps, Seigneur, vais-je t’appeler au secours, et tu n’entends pas, crier contre la violence, et tu ne délivres pas !" Ce cri de souffrance est toujours d’actualité. Nous éprouvons dans notre chair la douleur du monde, la violence déchaînée. Mais nous, chrétiens, nous savons où puiser notre force pour libérer l’humanité. Combien de temps encore crier contre la violence ?... Pourquoi toute cette misère à laquelle on est confronté ?... Même les prophètes ont posé ces questions à Dieu dans les moments difficiles. Ils n’ont pas perdu la foi pour autant.

Alors que Paul est en prison à cause de l’Evangile et que cette situation a de quoi déprimer Timothée, son jeune collaborateur, il nous rappelle que notre foi ne se limite pas à un ensemble d’idées, mais est d’abord le don d’une Bonne Nouvelle que nous devons communiquer et actualiser avec l’aide de l’Esprit-Saint. Rejeter la peur, choisir la confiance, même dans l’épreuve, être juste et responsable, aimer avec tendresse, voilà le projet chrétien, qui accomplit le désir, le rêve de Dieu. L’Esprit Saint peut réaliser ce projet en nous, avec nous. Saint Paul dit encore à Timothée : « Tu es le dépositaire de l’évangile. » Pendant longtemps, trop longtemps, on a réservé cette mission aux cadres de l’Eglise. On redécouvre aujourd’hui que chacun de nous est ce « dépositaire de l’évangile. » Il dépend de nous, là où nous sommes, que les paroles de jésus soient entendues, que ses gestes et sa vie soient les signes de l’amour du Père. Dieu a besoin des hommes. Mais si nous sommes dépositaires, nous ne sommes pas propriétaires. La Parole transite par nos mots, par notre comportement.

Les apôtres dans l’évangile d’aujourd’hui demandent à Jésus d’augmenter leur foi, mais ils lui demandent d’autres miracles pour convaincre. Jésus répond que la foi, il en faut très peu pour faire de grandes choses. La foi produit des choses impensables, aussi surprenantes que de déplacer avec toutes ses racines un sycomore, un arbre considéré indéracinable. Certaines tâches, qui apparaissent, à vues humaines, comme impossibles ou très aléatoires, sont perçues en même temps comme urgentes pour le Royaume de Dieu. Certains déracinements qui, dans un premier temps, semblent défier la sagesse et la prudence s’avèrent des coups d’audace que Dieu attendait.
Il ne faut pas s’attendre à ce que Dieu intervienne tout le temps dans nos vies sans que nous-mêmes collaborions. Pourquoi donc dans notre vie spirituelle demanderions-nous à Dieu de se mettre à notre service sans nous acquitter nous aussi de notre service envers lui ? Vis-à-vis de Dieu qui nous a tout donné, nous n’avons pas de droits à faire valoir. À la façon dont nous rendons service aux autres et par l’amour que nous manifestons, nous pouvons contribuer à ce que bien des gens s’ouvrent à Dieu et le découvrent. Nous nous sentons parfois démunis, aussi dépaysés, aussi mal à sa place qu’un vieux sycomore planté dans la houle. Et pourtant, Dieu aidant, les fruits viendront. La foi, il s’agit d’en avoir un tout petit peu pour réaliser ce que personne n’aurait cru possible. Il suffit d’un peu de foi, car la foi ne se dose pas, elle se vit et demande à être cultivée. Mais une fois la foi acquise, nous devons toujours prendre conscience que nous ne sommes que des serviteurs quelconques et inutiles.
L’homme n’a pas de droit à faire valoir vis-à-vis de Dieu, pas plus que le serviteur ne s’avise de se faire servir par son maître. Seuls conviennent à la condition de l’homme devant Dieu, la foi et le service fraternel. La gratuité est essentielle à l’amour tel que le décrit Luc. « L’amour véritable, disait saint Bernard de Clairvaux, n’est pas sans récompense, mais il n’aime pas en vue de la récompense ».

Dieu fidèle, tu connais nos doutes et nos questions. Nous avons parfois l’impression que nous avons si peu à donner. Viens réveiller notre foi ! Avec toi, nous deviendrons capables de transformer le monde où nous vivons et d’y annoncer ton Royaume, toi qui nous aimes pour les siècles des siècles. Amen !